Souvenez-vous. Cours de français en 1ère. Votre prof s’est mis en tête de vous faire découvrir Racine et Charles d’Orléans. Le vieux français a son charme paraît-il.
Admettons le tout de suite : votre historie d’amour avec ces « grands classiques » a tourné court. Pire : vous avez vécu un véritable enfer à la lecture de ces textes. Vous auriez préféré que l’on vous demande de lire l’annuaire !
Quand vous investissez dans l’immobilier, il y a également à connaître ce genre de document rébarbatif, au premier rang desquels le règlement de copropriété.
Ce texte qui régit les règles de la copropriété est TOUJOURS indigeste. Déjà qu’il faut lire le compromis de vente et ses innombrables annexes. Cela vous semble insurmontable. Du coup, vous êtes tenté de faire l’impasse, pensant que votre temps sera mieux exploité ailleurs.
Stop ! Ne commettez pas cette erreur. Vous devez prendre connaissance du règlement de copropriété. Et le plus tôt sera le mieux – personnellement c’est un document que je demande dès la première visite. Car, comme vous allez le voir, il peut vous simplifier la vie… ou vous la compliquer singulièrement.
Règlement de copropriété : définition
Le règlement de copropriété est un document écrit présentant le fonctionnement de l’immeuble. Il explicite les droits et devoirs des copropriétaires.
D’entrée de jeu, vous comprenez que si vous êtes propriétaire d’un immeuble de rapport complet, vous n’avez pas à édicter de règlement de copropriété. Vous serez en revanche tenu de le faire si vous décidez de vendre votre immeuble à la découpe, lot par lot, puisque vous partagerez alors la propriété.
Le syndic de copropriété est responsable de sa bonne exécution.
Il est rédigé par un professionnel (notaire, avocat par exemple) et son coût est d’environ 3 000 €.
Ce document est obligatoire depuis la loi la loi de juillet 1965 sur la copropriété.
Quelles informations trouve-ton dans le règlement de copropriété ?
En général, ce document est divisé en deux parties.
1. Règles de vie
Il va s’agir des règles de jouissance des parties privatives, des conditions d’utilisation des parties communes, de la destination de l’immeuble (usage professionnel, mixte…).
Pour rappel, les parties privatives correspondent aux locaux affectés à l’usage exclusif d’un copropriétaire (contrairement aux parties communes).
2. Règles de gestion
On parle ici de l’organisation de la copropriété : répartition des charges entre les copropriétaires et méthode de calcul pour obtenir les quotes-parts respectives (les fameux tantièmes de copropriété), administration des parties communes, état descriptif de l’indivision avec l’identification et l’inventaire de chaque lot, organisation du conseil syndical et tenue des assemblées générales…
Auprès de qui se procurer le règlement de copropriété ?
En tant que propriétaire, vous devez être en possession d’une copie de ce document. Vous êtes également dans l’obligation d’en transmettre des extraits à vos locataires concernant la destination de l’immeuble, la jouissance et l’usage des parties communes – bon autant leur donner le document complet ceci dit…
Si vous êtes en phase de prospection et que vous vous intéressez à un bien, vous pouvez bien entendu solliciter le syndic pour obtenir copie du règlement de copropriété. Plus rarement – par exemple si le syndic traîne un peu des pieds ou souhaite vous facturer le document, vous pourrez solliciter un membre du conseil syndical.
Comment modifier un règlement de copropriété ?
Il est nécessaire qu’il y ait un vote de l’assemblée générale des copropriétaires. Il faut que le sujet de la modification soit à l’ordre du jour.
Dans la plupart des cas, l’unanimité sera requise…c’est pourquoi ce type de changement est plutôt rare.
Que faire si le règlement de copropriété n’est pas respecté ?
C’est tout d’abord au syndic de faire cesser un trouble ou un comportement contraire au règlement de copropriété. Le propriétaire bailleur peut également être mis à contribution si le fait provient de son locataire.
Si le trouble persiste, le Tribunal de Grande Instance peut être saisi et ce par n’importe quel copropriétaire.
Et s’il n’y a pas de règlement de copropriété ?
Cas rarissime mais pas impossible.
Que se passe-t-il si l’assemblée générale des copropriétaires ne veut pas voter l’établissement de ce texte ou n’arrive pas à atteindre la majorité requise (deux tiers des voix) ?
A défaut, une décision de justice pourra être rendue. Tout propriétaire peut saisir le Tribunal de Grande Instance à cette fin.
Ce que vous devez regarder si vous souhaitez investir
Et avant d’investir, cela va de soi 🙂 . Vous allez particulièrement vous intéresser à la destination de l’immeuble.
Il s’agit ici de connaître ce qui est autorisé ou non dans l’immeuble. C’est extrêmement important, surtout si vous souhaitez créer une colocation ou faire de la location courte durée.
Colocation
Les règlements de copropriété excluant la colocation sont rares. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison que la plupart de ces documents datent d’il y a plusieurs dizaines d’années – époque à laquelle la colocation n’existait pas, tout du moins pas à l’échelle que l’on connaît aujourd’hui.
Néanmoins, vérifiez que ce type d’exclusion ne soit pas prévue car, sinon, ce que vous considériez jusque là comme une bonne opération pourrait tourner au cauchemar.
J’ai reçu plusieurs témoignages d’investisseurs créant des colocations empêtrés dans des difficultés avec le syndic et/ou les autres propriétaires de l’immeuble. C’est par exemple souvent le cas dans des immeubles où les propriétaires occupants sont installés depuis des décennies. Ils considèrent que les colocataires créent systématiquement des troubles (notamment liés aux fêtes).
Si vous vous êtes assurés que le règlement de copropriété n’exclut pas ce mode de location, vous aurez le droit avec vous.
Il existe également un débat sur une clause que l’on retrouve souvent dans les règlements de copropriété libellée de la sorte :
« Chaque appartement ne pourra être loué que dans sa totalité. La location par chambre est interdite ». Ou bien « la transformation des appartements en chambres meublées destinées à être louées à des personnes distinctes est interdite, mais la location en meublé d’un appartement entier est autorisée. »
Cela signifie que vous pouvez faire de la colocation mais avec un seul bail pour l’appartement et non un bail par chambre.
Location courte durée
Gare ici à la clause d’habitation bourgeoise exclusive. Celle-ci signifie que seules les habitations sont permises dans la copropriété. A contrario, les activités commerciales ou professionnelles ne seront pas tolérées.
Impossible dans ce cas d’envisager exercer la location courte durée. Ou alors c’est à vos risques et périls !
Vous retrouverez les règles dans la partie « usage des parties privatives ».
Location meublée
Il arrive que le règlement de copropriété interdise purement et simplement la location meublée !
Vous trouvez dans ce cas ce genre de libellé « la location de plus d’une pièce en meubles est interdite ».
Rassurez-vous : c’est assez rare de tomber sur ce genre de restriction.
Division de propriété
En principe, chaque copropriétaire peut diviser son bien en plusieurs lots. La limite est que si cette division porte atteinte à la destination de l’immeuble, elle ne peut être réalisée. Par exemple si vous augmentez le nombre d’occupants de l’immeuble, on peut considérer que cela affecte le standing de l’ensemble.
Autre limite : si la division entraîne une nouvelle répartition des charges, il faudra obtenir l’accord de l’assemblée générale des copropriétaires et modifier l’état descriptif de division (acte notarié faisant l’objet d’une publication = à votre charge si vous sollicitez la division).
Obligation de communiquer sur vos locataires… et le montant de vos loyers !
Clause particulièrement étonnante que celle-ci :
« Le propriétaire devra, quinze jours au moins avant la mise à disposition des lieux, prévenir le syndic, par lettre recommandée, de la location consentie, en précisant le nom du locataire, le montant du loyer et son mode de paiement. L’entrée de l’immeuble pourra être refusée au locataire tant que le copropriétaire intéressé n’aura pas avisé le syndic, dans les conditions ci-dessus, de la location par lui consentie. »
Oui c’est parfaitement lunaire mais ce type de mention existe – et plus souvent que l’on ne peut le croire.
Dans 99 % des cas, personne ne s’y réfère… sauf si le syndic ou un autre copropriétaire veut vous chercher des poux dans la tête.
Mon conseil : ne vous embarrassez pas à transmettre ces détails indiscrets sauf si on vous le demande expressément (ce qui serait mauvais signe). Et encore, à l’heure du RGPD, je trouve cela assez limite !
Stationnement
Petit aparté concernant le sujet car c’est un souci récurrent dans la ville où j’investis. Et ce n’est sans doute pas une particularité locale. Il y a des parkings de copropriété assez mal réglementés.
Voici typiquement le genre de clause que je lis « dans le parking, seules les personnes munies d’une autorisation de stationner sont autorisées à rentrer leur véhicule » (jusque ici, tout va bien) « dans la mesure des places disponibles ».
Tout est dans cette dernière phrase ; en fait il n’y pas assez de place par rapport au nombre de véhicule de la copropriété. En résumé, vous pouvez entrer sur le parking mais si vous ne trouvez pas de place, marche arrière et attendez votre tour !
Assez mal pensé, n’est-ce pas ?
En cas de doute
Si vous n’êtes pas sûr de faire la bonne interprétation, le plus simple est de prendre contact avec le syndic pour en avoir le coeur net. Ou avec le conseil syndical – encore que ce n’est pas forcément ce que je conseille car les personnes du conseil syndical vous décourageront sans doute d’engager une coloc ou de faire de la location courte durée…
Vous pouvez également soumettre le texte à votre notaire préféré.
Au final
S’il est bien rédigé, le règlement de copropriété permet d’éviter les litiges entre copropriétaires.
Comme vous venez de le voir, il permet surtout de vous conforter dans votre « étude de marché » avant d’investir.
En effet, un règlement de copropriété trop restrictif limitera le potentiel du bien que vous convoitez. La conclusion sera souvent la même à ce moment : next one !