Il y a des réveils difficiles. Des enthousiasmes qui vous débordent et que vous finissez par regretter en prenant un peu de recul.
Prenons un exemple simple : vous êtes une personne enthousiaste à l’idée d’investir, vous avez lu de nombreux articles sur le sujet, vu des vidéos, éventuellement suivi des formations. Vous vous êtes dit « je suis prêt, je me lance ! ».
Ce qui fait que, en vrai fonceur, vous vous êtes un peu laissé emporté : vous avez formulé une offre qui a été acceptée avant de signer un compromis de vente.
A présent, la tête froide, les chiffres sous les yeux, vous vous dites que cela n’a rien de l’affaire du siècle. Une rentabilité moyenne, un cashflow négatif et peu de chance de réaliser une plus-value.
Tout n’est pas perdu. Il est peut-être encore temps de vous désengager. Pour cela, il faut vérifier que vous êtes encore dans le délai de rétractation du compromis de vente.
Voilà sans doute une question qui, en principe, ne mériterait pas un article entier. Une réponse courte devrait suffire.
Oui mais… Comme souvent dans notre beau pays, il y a la règle et les exceptions .
Délai de rétractation d’un compromis de vente : le principe des 10 jours ouvrés
L’acquéreur, et seul l’acquéreur, dispose de la faculté de se rétracter dans un délai de 10 jours après la signature du compromis.
Comment compter le délai de rétractation de 10 jours ?
Il faut ici être précis concernant ce délai. Il court à compter du lendemain du jour où vous avez été notifié du compromis, que celui-ci ait été signé chez le notaire ou en agence immobilière.
Il y a une première subtilité en l’occurrence : vous pouvez être notifié dès le jour de la signature chez le notaire, en présence de ce dernier, ou encore par courrier recommandé avec accusé de réception ou enfin par exploit d’huissier.
Seconde subtilité : ce délai ne va courir qu’à partir du moment où le vendeur vous aura transmis toutes les pièces obligatoires, tels que les diagnostics immobiliers. Cela m’est arrivé une fois j’avais signé le compromis en agence mais il manquait plusieurs pièces.
Ce délai court sur 10 jours calendaires : on doit donc compter tous les jours – y compris les samedi et dimanche, les jours fériés et / ou chômés.
Troisième précision : si le délai s’achève un dimanche un dimanche ou un jour férié, le délai est prolongé jusqu’au jour ouvrable qui suit. Le texte officiel est ici.
Prenons un exemple pour que cela soit plus clair :
vous avez signé un compromis de vente 5 octobre. Le délai va commencer à courir à partir du 6 octobre. Il va expirer le 15 octobre à 23h59.
Comment notifier sa rétractation ?
Une simple lettre recommandée avec accusé de réception suffit. Il vous faudra l’adresser au vendeur ou à son représentant (notaire). C’est le cachet de la Poste qui fait foi.
Conséquences de la rétractation
Vous ne risquez aucune pénalité et n’avez aucun besoin de justifier votre choix.
Si vous avez versé un séquestre, celui-ci doit vous être remboursé dans le délai de 21 jours. Aucun frais ne peut vous être réclamé.
Le cas particulier de l’acquisition par des personnes morales
Attention ! Si vous achetez en SCI, SARL ou SAS, la société ne dispose pas de ce délai de rétractation. Seuls les acquéreurs particuliers disposent de 10 jours pour se rétracter.
Le cas particulier de l’achat de locaux commerciaux
Ici encore, le délai de 10 jours ne s’appliquera pas. Seuls les biens destinés à constituer une habitation sont visés par ce délai : que ce soit une résidence principal ou un investissement locatif.
Vous me direz « quid d’un immeuble mixte ? » Par exemple un immeuble de rapport constitué d’appartements et de commerces en rez de chaussé comme cela arrive souvent.
Dans ce cas, la jurisprudence estime que le délai ne doit pas être accordé. Voici la décision de la Cour de Cassation pour les férus de droit.
Le délai joue-t-il pour l’achat de locaux accessoires ?
Excellente question car cela concerne quand même pas mal de biens : garages, caves, greniers…
Si ce local n’est que l’accessoire d’un bien destiné à l’habitation et qu’il est vendu en même temps, vous bénéficiez des 10 jours pour vous rétracter. En revanche, si le local est vendu seul, vous ne pourrez pas vous réclamer de ce droit.
Autre cas particulier : les ventes aux enchères
Si vous achetez un bien lors d’une vente aux enchères, vous ne bénéficiez pas du délai de rétractation.
Aië, le délai de rétractation est passé
Dans ce cas, vous êtes par principe engagé.
Néanmoins, vous et votre notaire avez sans doute fait mentionner un certain nombre de clauses suspensives dans le compromis. Si l’une de ces clauses n’est pas remplie, vous pourrez alors vous dégager du compromis puisque celui-ci sera caduque. Le cas classique (et à mon avis appelé à se répéter de plus en plus fréquemment) est la non obtention du crédit immobilier. Il faut alors le justifier avec une attestation de refus de prêt.
Mais il existe d’autres situations telle que la condition suspensive liée à la vente préalable de sa résidence principale.
Si les clauses suspensives ne peuvent pas être employées, il vous reste toujours la possibilité de vous désengager mais vous y laisserez vraisemblablement votre séquestre. D’où l’intérêt de négocier le montant de ce séquestre au départ ! Voire de ne pas en verser du tout !
Un délai de rétractation d’un compromis de vente de 14 jours ?
Halte là ! Ce délai de 14 jours n’existe pas en immobilier.
C’est un délai dont vous bénéficiez en tant que consommateur lorsque vous faites des emplettes sur Internet ou par téléphone. Rien à voir donc !
Au final…
Le délai de rétractation est un droit que vous pouvez exercer 10 jours après la signature du compromis en tant qu’acquéreur.
Ceci dit, c’est presque votre dernière chance pour faire marche arrière. Sachant que vous aurez eu l’occasion de vous rétracter avant – par exemple, après avoir formulé une offre, même si celle-ci a été acceptée – je ne vous recommande pas forcément d’attendre d’avoir signé un compromis pour bien réfléchir aux tenants et aboutissants de votre investissement.